19
ans après la première « conférence des parties »
signataires de la convention climat de l'ONU,
la vingtième « COP » s'est clôturée à Lima au
Pérou, le 13 décembre.
Résultat ? Un texte de 43 pages, « Lima Call for Climate Action », a été
accepté à l'arrachée.
Il est truffé de paragraphes optionnels, qui indiquent les
désaccords restant à
combler. Ce texte servira de base à l'accord définitif, attendu à
Paris en décembre 2015. Echec, ou réussite, que cette COP
de Lima ? Au sens strict, c'est-à-dire au vu des objectifs officiels,
c'est une réussite, puisqu'une ébauche de texte a bel et bien été
produite. Plus largement, cette conférence numéro 20 n'a pas
fait bouger les lignes : les différences d'approche qui
existaient auparavant,
notamment entre les pays industrialisés et les pays les plus
pauvres, subsistent. Les financements nécessaires pour s'adapter au
changement climatique et pour décarboner les économies restent
chiches. D'où les déceptions, affichée par les « vieilles
barbes » des négociations climatiques et par les ONG
environnementales. A leurs yeux, ce qui est sorti de Lima ne pisse pas loin.
Entre accord climat et stratégie du colibri
Pendant douze
jours, les 193 Etats membres de l'ONU, plus l'Union Européenne et
deux états rattachés à la Nouvelle Zélande (Cook et Niue, non membres de l'ONU), soit
196 « parties » au total, ont donc négocié l'ébauche
d'un traité Kyoto 2.0. Le but de ce nouveau traité sur le climat, qui doit
être finalisé lors de la prochaine COP, à Paris en décembre
2015, est d'engager les signataires à réduire leurs émissions de
CO2, en cohérence avec un objectif de réchauffement climatique
limité à 2°C d'ici 2100 (par rapport aux températures de l'ère
« pré-industrielle »). Encore faut-il que les 196
signataires fassent comme l'Union Européenne l'a déjà fait
en octobre : annoncer un engagement chiffré de réduction. Si tous les Etats n'ont pas
joué le jeu avant le 31 octobre 2015 (ils sont même invités à le faire avant le 31 mars), la COP 21 fera « pshitt » et les autres
pays auront devant eux une alternative : renoncer, ou bien faire
comme le colibri dans la fable de Pierre Rabhi.
ONU : « le monde est sur
les rails pour Paris 2015 »
Le communiqué final
de la Convention cadre de l'ONU sur le climat est un très bon
révélateur sur ce qu'a produit Lima : peu de choses nouvelles
mais quelques avancées et des gros obstacles maintenus. Pour preuve,
voici les deux premiers points mis en avant par l'ONU. Je les
décrypte.
- Financement du Fonds vert : « Des engagements ont été annoncés par des pays développés et en développement, avant et pendant la COP », à hauteur de plus de 10 Milliards de dollars.
Décryptage : à Copenhague (COP 15
en 2009) l'engagement était d'apporter 100 milliards de dollars par
an d'ici 2020. Il reste six ans pour rassembler les 90 milliards
manquants, ce qui fait 15 milliards d'annonces nouvelles en moyenne
chaque année. Le chiffre peut paraître énorme, mais il est faible
comparé aux subventions que les Etats versent à la consommation
d'énergies fossiles (554 milliards de dollars en 2012, selon
l'agence internationale de l'énergie).
- « Les niveaux de transparence et de confiance ont atteint des nouveaux sommets (sic) puisque plusieurs pays industrialisés se sont soumis à l'évaluation de leurs objectifs de réductions d'émissions, dans le cadre d'un nouveau procédé appelé « évaluation multilatérale ».
Mais la crainte des négociateurs est que les engagements annoncés pays par pays d'ici décembre 2015 ne soient pas comparables et qu'on ne puisse par en faire la somme. Autre crainte : que par la suite le degré d'atteinte de ces annonces ne soit pas vérifiable. D'où l'accent mis sur les « bonnes pratiques » de transparence sur les objectifs de réduction CO2. C'est tout l'objet du nouveau procédé d'évaluation multilatérale auquel 17 pays se sont plié à Lima. Une sorte de tentative d'émulation / pression par l'exemple...
Dans les autres points à retenir : un prix au carbone
Deux nouveautés sont à souligner dans le texte qui a été adopté : la première est qu'il accorde (presque) la même importance aux mesures d'adaptation au changement climatique qu'aux mesures de réduction des émissions CO2 (« atténuation » ou mitigation en anglais). C'est fondamental pour les populations les plus touchées par le changement climatique.
Deuxième nouveauté : le texte
reconnaît dans son préambule l'importance de mettre un prix (un
coût) au carbone : « le prix du carbone est une approche
clef pour que les réductions d'émissions de gaz à effet de serre
soient viables économiquement (« cost effective ») ».
Le prix du carbone signifie soit une taxe soit un système de quotas
CO2 comme celui du marché européen ETS.
L'agenda 2015
Les équipes de Christina Figueres, la
secrétaire générale de la Convention climat de l'ONU, ainsi que
celles de Laurent Fabius, qui pilote l'organisation de la conférence
COP21 à Paris, ont désormais des jalons clairs : les 195 pays sont
invités à présenter leurs objectifs de réduction avant le 31
mars. Et l'ONU devra présenter une somme ou une « agrégation »
de tous ces objectifs pour le 1er
novembre 2015. D'ici là, les pays les plus exposés auront
continué de trinquer et les colibris seront, probablement, un peu
plus nombreux à éteindre l'incendie.
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Quelques articles de la COP Lima :
Pas de fumée blanche à Lima
dimanche malgré les prolongations / AJEC 21
Dans cet article Claude-Marie Vadrot, un journaliste qui
couvre les conférences climat de l'ONU depuis des années, est sans
concession. A ses yeux, l'accord est faible et le spectre d'un
réchauffement au-delà des 3°C se précise.
A Lima, la COP 20 sauve la face plus
que la planète / Libération
Christian Losson décrit les tensions
présentes à Lima. Intéressant.
L'accord de
Lima sauve les négociations climat, l'Inde est satisfaite / Times of India
Selon le ministre de l'environnement
indien, dont le pays est le troisième plus gros émetteur de CO2 , à
Lima « toutes les attentes de l'Inde on été satisfaites »,
en particulier le maintien du principe de « responsabilités
communes et différenciées », qui implique que les gros
émetteurs historiques (pays de l'OCDE) fassent plus d'effort que les
nouveaux ateliers du monde global. L'inde est attendu au tournant sur
ses objectifs climat.
Crédit photo : Joisey Showaa / Flick
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