lundi 30 mars 2015

Une agence fédérale américaine propose de réglementer les nanoparticules


Le 25 mars, l'Agence américaine de l'environnement EPA (Environmental Protection Agency) a publié une proposition de réglementation sur les nanoparticules, qui s'inspire de la réglementation française. Et qui surprend. Au pays roi de la réglementation « ultra light », ce serait une première.

Photo : visualisation de nanomatériaux au microscope


L'EPA propose le reporting et l'obligation d'enregistrement pour certaines substances chimiques quand elle sont fabriquées à l'échelle nanométrique.

Voici un extrait du résumé publié par l'EPA :

Ajout du 10 avril : la page de l'EPA (le lien que j'ai mis initialement) a été modifiée, depuis que le préprojet ("prepublication") de réglementation a été transformé. Voir l'actualisation de l'EPA, commentée par la société de conseil juridique Bergeson & Campbell


"Spécifiquement, l'EPA propose d'obliger les personnes qui fabriquent (y compris qui importent) ou utilisent, ou qui envisagent de produire ou d'utiliser ces substances chimiques, de notifier à l'EPA certaines informations, incluant l'identité chimique spécifique, le volume de production, les méthodes de fabrication, des informations sur les expositions et délivrances, et tout autres données existantes qui concernent les impacts environnementaux et sanitaires.
(…)
Cette information faciliterait l'évaluation par l'EPA de ces matériaux ainsi que l'identification des actions supplémentaires qui seraient nécessaires ».

Cette proposition de loi s'appuie sur la  Toxic Substances Control Act (TSCA) qui autorise l'EPA à demander une telle transparence.

Les nanoparticules visées sont celles qui « sont fabriquées ou synthétisées dans une forme telle que les particules primaires, agrégats ou agglomérés ont une taille entre 1 et 100 nanomètres et présentent des caractéristiques uniques et nouvelles à cause de leur taille ».

L'EPA a soumis cette proposition typiquement française aux commentaires du public américain, pendant une période de 90 jours.




Crédit photo : Université d'Exeter / flickr / creative commons




mardi 24 mars 2015

Animal social saison 1

Flashback. Trois articles les plus lus du blog Animal social, saison 1 (2010/2013)... Et pour faire le lien entre les deux blogs.


Innovation sociale : la définition de l'OCDE


En 2000, l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) a proposé une définition de l’innovation sociale en tant que « réponses nouvelles aux problèmes sociaux, qui améliorent le bien-être individuel et collectif ». Mais il a fallu attendre 2011 pour que l’organisation issue du Plan Marshall fournisse une proposition de définition… du bien-être, via son « Better life index ». Critiquée pour son caractère trop individualiste, cette définition du bien-être fournit des pistes pour les champs d’action de l’innovation sociale.

https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgxhnzU3pry2TZR4CR5RLiNJuiHx5wTytGaxnrWlVkPICya4xUUZNOoXroFMjyjy2754kN0VFZj0dCfCkHILbfSmvFutvVxSHxyttg8ggY2SWJD4EU84epbYjEqln9v3fjZBTutfY5np7s/s1600/biosphere-2.jpg


Qu'est ce que la biosphère ?





Pratiques publicitaires : le tabou de l’impact social


L’étude "Think me as evil" interpelle les milieux publicitaires, les entreprises anglaises et les journalistes spécialisés, depuis sa parution en octobre. Que nous dit-elle ? Que la publicité a dans sa majorité des impacts sociaux et psychologiques négatifs. Ces impacts devraient davantage être étudiés par les entreprises pour être inclus dans leurs rapports de Responsabilité Sociétale d'entreprise (RSE). Mais attention. « Think me as evil » n’est pas un brulôt d’anti-capitalistes : l'étude est co-réalisée par des professionnels chevronnés de la pub.

mercredi 18 mars 2015

Attali agite la COP21


A propos de la conférence Paris Climat COP21, Jacques Attali vient de mettre les pieds dans le plat. Il publie un post un brin provocateur, sur son blog hébergé par l'Express : "A quoi peut encore servir la COP21 ?".

Plusieurs choses surprennent dans ses propos, au point que son billet semble presque être un HOAX :



1. Il met sur le même niveau les climato-sceptiques et les scientifiques du GIEC. Il y a pourtant un consensus scientifique sur l'influence des émissions de GES sur le changement climatique.

2. Tout à son coming out sur une économie positive, il invite la France à torpiller l'agenda de la COP21, pour placer les "solutions" au coeur de la conférence... C'est irréaliste. Les solutions viennent en complément de la négo. sur le climat, mais pas à la place de.... ce que l'ONU et les autres Etats n'accepteront jamais.

3. Il met en avant, du côté des solutions, la moins consensuelle de toutes, l'énergie nucléaire. Or aucun accord sur le climat ne pourra atteindre un consensus sur le nucléaire. Là aussi, cela semble totalement irréaliste, quel que soit le point de vue (pour ou contre) qu'on ait sur le nucléaire.

Le plus drôle est peut-être son affirmation : «L’altruisme est la meilleure façon de lutter contre les émissions de CO2 ». Certes, c'est tout à fait cohérent avec ses efforts (notamment via son ONG Planet Finance) pour promouvoir une philanthropie à la française, mais là aussi, c'est assez inoui. Ne fut-ce que parce que la solution à un problème complexe est une solution multiple.

Au final, les propos de Jacques Attali font probablement déjà la joie des climato-sceptiques, c'est-à-dire, fondamentalement (et quantitativement), de la droite américaine. Ces derniers voient dans la négation du changement climatique un volet parmi d'autres de leur lutte acharnée contre la taxe et contre la régulation de l’État.

Article modifié en oct. 2015 : j'avais été un brin trop véhément envers Jacques Attali.


Crédit photo : fondation pour l'innovation politique, creative commons, Flick


dimanche 8 mars 2015

Dunkin Donuts dit niet aux nanoparticules


En 2013, une étude identifiait du dioxyde de titane dans le sucre en poudre des célèbres donuts de Dunkin'Brands. Deux ans plus tard, l'entreprise américaine vient d'annoncer qu'elle renonce à utiliser ces nanoparticules comme agent de blanchiment dans ses confiseries. Le résultat d'une pression menée par l'ONG As You Sow.



Oakland, 5 mars 2015. Communiqué d'As You Sow : « Dunkin'Brands, la compagnie mère de la chaîne Dunkin'Donuts, a accepté d'enlever le dioxyde de titane, un agent blanchissant qui est une source répandue de nanoparticules, de tout le sucre en poudre qu'elle utilise pour faire ses confiseries « donuts ». En conséquence de ce progrès, le groupe de pression As You Sow a retiré sa proposition de résolution actionnariale, qui demandait à Dunkin ' d'évaluer et de réduire les risques d'utiliser des nanomatériaux dans ses produits alimentaires ».

Alors qu'en France, l'utilisation de nanoparticules doit faire l'objet d'un enregistrement auprès des autorités, sous certaines conditions, aux Etats-Unis, l'usage de nanoparticules n'est absolument pas réglementé et les entreprises ont donc tout loisir d'ajouter des nanoparticules dans leurs produits, sans devoir informer le consommateur. Pour y voir plus clair, en 2013, l'association As You Sow a réalisé une étude, Slipping Through the Cracks: An Issue Brief on Nanomaterials in Food sur la présence de nanoparticules dans l'agro-alimentaire. Parmi les 2500 entreprises interrogées sur leur utilisation de nanoparticules, 26 ont répondu. 

Dans le cadre de cette étude, As You Sow a aussi commandé des tests auprès de laboratoires indépendants, pour évaluer la présence de nano TiO2 (dioxyde de titane) dans deux types de donuts. 
 « Les tests ont révélé des nanoparticules d'une taille égale ou inférieure à 10 nanomètres. (…) Sans qu'on sache si ces particules ont été ajoutées spécifiquement ou si elles sont un sous-produit de procédés de fabrication ». 

Précisément, le laboratoire a identifié du titane, à des concentrations allant de 19 à 75 parties par million (ppm), après avoir réalisé une série de filtrages sur des échantillons de sucre en poudre. La présence du titane est un indicateur probable de TiO2, puisque, d'après As You Sow, « le dioxyde de titane est la seule forme de titane possible (« allowed ») dans la nourriture ». Quel est le problème ? Le titane, bien qu'il soit considéré comme biocompatible (inoffensif) dans les implants dentaires, pourrait, sous sa forme « minuscule », être beaucoup moins accommodant : des tests de génotoxicité ont par exemple montré des lésions sur l'ADN de cellules humaines, selon le CNAM.

En 2011, dans la foulée d'une étude franco-suisse sur ce nanomatériau, le professeur Jürg Tschopp déclarait au magazine Que Choisir qu' « avec le dioxyde de titane, on se retrouve dans la même situation qu’avec l’amiante il y a 40 ans ». Cette molécule est classée depuis 2006 comme "cancérigène possible" par le Centre international de recherche sur le cancer, une institution qui dépend de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).



C'est à la suite de son étude en 2013, qu'As you Sow avait décidé de faire pression sur le premier fabricant de donuts aux Etats-Unis. Comment ? En mobilisant les actionnaires de l'entreprise, c'est ce qu'on appelle en France l'engagement actionnarial. Ces efforts ont porté leurs fruits, puisque Dunkin Donuts vient d'annoncer, dans un courrier du 25 février 2015 à l'association, avoir « reformulé le sucre en poudre utilisé dans les dunkin' donuts pour ôter le dioxyde de titane ». Les pâtisseries nouvelle version devraient arriver dans les étals prochainement.

En 2013, la France est devenu le premier pays d'Europe à avoir mis en place un dispositif obligatoire de déclaration des substances à l’état nanoparticulaire. Ce dispositif est visible sur le site r-nano.fr Mais pour l'instant il ne permet pas au consommateur lambda de savoir quels sont les produits et les marques qui embarquent des nanoparticules.

Il y a bientôt dix ans que des scientifiques ont demandé une réévaluation du risque du dioxyde de titane sur la santé humaine. Plusieurs études toxicologiques seraient en cours sur le sujet.

Crédit photos : Eric Lewis et Mike Mozart (Flickr, creative commons)