jeudi 21 novembre 2019

Quoi de neuf en RSE à Sustainable Brands 2019 « New Metrics » ?


Limites planétaires, certification « 3BL », tableau de bord multi-capital, neutralité plastique : autant de sujets débattus à la conférence « New metrics » 2019 organisée par Sustainable Brands. Des initiatives convergent pour réduire le fossé entre la RSE et le maintien des équilibres environnementaux.




Du 18 au 20 novembre à Philadelphie, se déroulait la conférence Sustainable Brands 2019 « New Metrics ». Cette conférence, qui réunit quelques 300 top managers de la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE), est un des rassemblements les plus intéressants de la communauté RSE mondiale, portant sur les « nouveaux indicateurs / modes de calcul RSE». C’est un moment privilégié pour capter des sujets émergents et pour voir comment évoluent des sujets plus anciens. Voici ce que j’en retiens, depuis Paris, en utilisant Twitter et en scannant le programme (une manière neutre en carbone d’assister à une conférence :-).

En deux mots, la conférence confirme l’intrusion bienvenue des « limites planétaires » dans les débats autour de la mesure de la RSE. Cette intrusion est portée en particulier par les promoteurs du Global Thresholds & Allocations Council (GTAC), qu’on peut traduire par « Conseil global pour allouer des limites ».

Les limites de la planète s’invitent dans la RSE


C’est Gil Friend, le fondateur de Natural Logic, qui a relayé l’info : une étude présentée à Philadelphie s’est intéressée à la place des « limites planétaires » dans les rapports RSE. Les limites planétaires environnementales (« planetary boundaries ") ? Il s’agit d’un concept scientifique majeur, popularisé par les travaux de Johan Rockström du Centre sur la Résilience de Stockholm et de son co-auteur Will Steffen. L’étude présentée à SBM 2019 montre que sur 40.000 rapports RSE publiés entre 2000 et 2013, un petit 5% fait référence aux limites planétaires. « The blind leading the blind ? » questionne Gil Friend.




Ces limites planétaires constituent un cadre indispensable pour relier les stratégies RSE avec un développement soutenable crédible au plan environnemental. Elles ont une place de choix dans le dernier rapport sur l’environnement publié par l’Etat français et dans de plusieurs publications des Nations Unies. Le fait que 95% des rapports RSE n’y fassent pas référence, valide une fois de plus l’idée suivant laquelle, « faire de la RSE », ce n’est pas « faire de la soutenabilité » ni « être durable » au sens d’une réelle durabilité environnementale.

La RSE actuelle, c’est surtout une gestion de risques et opportunités extra-financières et un outil de différenciation stratégique pour les entreprises...

Global Thresholds & Allocations Council (GTAC)


Or relier la RSE avec les limites planétaires, c’est justement ce que proposent les promoteurs du Global Thresholds & Allocations Council (GTAC), présents eux aussi à Philadelphie. Les promoteurs du GTAC, qui a été lancé en 2018, sont coordonnés par l’organisation allemander3.0, qui s’appelait auparavant reporting 3.0.

La communauté autour de r3.0 s’appuie sur des travaux du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (UNEP) et propose la « une approche de référence pour un reporting de la performance RSE / ESG qui soit en relation avec les limites et les frontières planétaires généralement acceptées ».

r3.0 proposes the formation of a multi-stakeholder Global Thresholds & Allocations Council (GTAC), to establish an authoritative approach to reporting economic, environmental and social performance in relation to generally accepted boundaries and limits.
https://www.r3-0.org/gtac/

L’ambition est considérable, il s’agit de mettre fin au « sustainability context gap » c’est-à-dire à la déconnexion des politiques et objectifs RSE d’avec les limites écologiques du système-Terre.
Un des défis majeurs de la RSE, selon moi, est justement d’intégrer ces paramètres dans des trajectoires de soutenabilité, un peu comme l’initiative « Science Based Target » le propose pour le climat, en se fixant 2 degrés Celsius ou 1,5° (mieux) d'augmentation des températures en 2100, comme limite planétaire à respecter. 

Intégration utopique, ou réalisable ? Le défi est immense... Et il ne doit pas oblitérer la partie sociale et sociétale, donc politique, de la soutenabilité : réduction des inégalités et investissement dans le patrimoine commun (par exemple l'offre de santé publique d'aujourd'hui, qui servira aux malades de demain).

Certification « Triple bottom line »


Autre nouveauté intéressante présentée à SB 2019 : c’est la nouvelle certification « Triple bottom line », qui permet aux entreprises de faire certifier leur démarche de comptabilité intégrée, en s’inspirant du concept TBL de John Elkington. A quand la première entreprise française certifiée TBL ? Vite vite, les amis innovateurs de la RSE, foncez persuader votre Comex !! 

J’avoue que je n’ai pas eu le temps de creuser l’intérêt de cette certification, au-delà de la différenciation et de la bonne réputation qu'elle peut apporter aux organisations, et au-delà, aussi du nouveau gisement de business qu'elle constitue pour les consultants en RSE (le marché de la vertu, pour reprendre le titre du livre de David Vogel). 

«Au cœur du programme de certification TBL, il y a la reconnaissance de la méthode du tableau de bord multi-capital, outil de comptabilité de la performance basé sur le contexte et open source. Il a été développé par Martin P. Thomas au Royaume-Uni et Mark W. McElroy aux USA ».

At the heart of the Certified TBL program, then, is its advocacy of the MultiCapital Scorecard method, an open-source, context-based performance accounting tool developed by Martin P. Thomas in the UK, formerly of Unilever, and Mark W. McElroy in the U.S., formerly of Price Waterhouse, KPMG and Deloitte Consulting.  

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D'autres sujets intéressants et controversés, comme la neutralité plastique, devaient être abordés à SB 2019 New Metrics... Le programme de l'événement est détaillé sur le site de la conférence.


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mercredi 13 novembre 2019

Greenwishing : ces douces illusions qui sapent la RSE et l'ISR



Et si le monde de la RSE et de l’Investissement socialement responsable (ISR) était victime de « greenwishing » ? Cette posture sincère revient à se bercer d’illusions sur la capacité des solutions actuelles à atteindre à une « durabilité ». D'après Duncan Austin. Incisif.

En juillet 2019, Duncan Austin, ancien directeur du prestigieux fonds d’investissement « vert » co-créé par Al Gore (23 milliards de dollars en gestion), ancien associé au World Resource Institute, a publié un essai de 17 pages, qui a suscité beaucoup d’intérêt. Titre de son essai : «Greenwish : The Wishful Thinking Undermining the Ambition of Sustainable Business ». En français :  Greenwish : les illusions qui sapent les ambitions de l'économie durable".

Fort de 25 ans d’expérience dans l’investissement socialement responsable (ISR) et dans la politique climatique, Duncan Austin dresse un constat désabusé sur les réussites de l’entreprise durable. « Mauvaise nouvelle pour l’environnement : l’économie durable ne réussit pas », écrit-il.

A ses yeux, le mouvement de la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et de l’ISR serait victime de « greenwishing ». Plus répandu et plus difficile à défaire que le « greenwashing », le greenwishing est une posture mentale qui revient à se bercer d’illusions sur le potentiel de changement de l’actuel « business durable ».

Outre une critique désabusée des limites de la RSE et de la finance responsable, Duncan Austin fait un plaidoyer pour un changement systémique et pour plus d’action politique.

Et si au lieu de contribuer à construire un monde soutenable, les efforts actuels pour plus d’ISR et de RSE contribuaient à prolonger les causes du problème ?





Qui est Duncan Austin ?

L’auteur a été associé senior au World Resource Institute (WRI) entre 1996 et 2004. Il est notamment l’auteur en 1997 du livre « Climate Protection Policies: Can We Afford to Delay? » édité par le WRI.

Puis Duncan Austin s’est lancé dans la finance responsable, ce que les Anglo-saxons appellent le « socially responsible investing » et les Français l’Investissement socialement responsable (ISR). Duncan a été directeur de Generation Investment Management LLP, la société d’investissement « greentech » co-créée par Al Gore en 2004. Il est resté 14 ans dans cette entreprise pionnière du capital-risque et de l’ISR « vert ».

« Devant l’opposition coordonnée et nouvelle des entreprises aux régulations et devant la déception après la réunion de Kyoto en 1997, comme beaucoup d’autres, j’ai cherché à mobiliser les forces du marché pour promouvoir la durabilité ».

Constat d’échec sur la RSE

L’essai de Duncan Austin commence par un constat en apparence positif : la Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et l’Investissement socialement responsable (ISR) n’ont jamais eu autant de succès qu’aujourd’hui. Alors qu’en 1999, onze entreprises seulement avaient publié un rapport RSE, en 2019, tout le monde ou presque se pique de faire de la RSE. Alors qu’en 1999, l’ISR était marginal, de plus en plus d’investisseurs affirment en 2019 prendre en compte ou vouloir prendre en compte une performance environnementale et sociale (les critères ESG). L’ISR a le vent en poupe ? Un seul exemple le montre : les déclarations et les engagements récents du fonds d’investissement américain Blackrock

Mais Duncan Austin nous rappelle tout de suite à la dure réalité. Malgré l’engouement pour la RSE et l’ISR, le compte n’y est pas. Il en veut pour preuve la trajectoire des émissions de CO2, qui au lieu d’être en phase avec les objectifs de la COP 21, nous promettent un avenir climatique catastrophique. Il en veut pour preuve aussi l’état de dégradation de la biodiversité et l’érosion de la qualité des sols. Si cette partie de son argumentaire n’est pas très détaillée, la lecture des publications scientifiques sur la situation de la planète et des écosystèmes, qui se succèdent dans les revues Nature, Science et dans toutes les revues scientifiques à une cadence quasi infernale, lui donne amplement raison.

Sa conclusion est la suivante
« Mauvaise nouvelle pour l’environnement : l’économie durable ne réussit pas ».
La machine profit toujours gagnante

Cet échec découle selon Duncan Austin de trois éléments : le premier est d’avoir sous-estimé la capacité de la machine profit et de ses modes de calcul très imparfaits à rester dominants : il constate, après 14 ans passés dans l’ISR que la « shareholder value maximisation », c’est-à-dire la maximisation de la valeur pour l’actionnaire reste la principale force à l’oeuvre dans l’économie et par conséquent dans le « business responsable ». Constat un peu naïf tant cela semble évident ? Certains le penseront. 

« L’ISR s'est retrouvé confronté à la maximisation de la valeur pour l’actionnaire et les résultats continuent d'être défavorables pour la planète ».

Et ce ne sont pas hélas, selon Duncan Austin, les efforts actuels pour redéfinir la valeur ou la performance globale qui y changeront grand-chose.

« L’enthousiasme pour le potentiel win-win de l’économie verte (« market environmentalism ») s’affaiblit, devant l’impression que le néo-libéralisme a tout simplement capturé le mouvement. (…) Les investisseurs ISR perpétuent un système de prix que d’autres investisseurs peuvent exploiter – légitimement et de façon profitable, activement ou passivement -, mais avec des buts directement opposés ».

Autrement dit, l’ISR et le « business durable » sont utilisés par la mentalité dominante, qui reste la maximisation de la valeur actionnariale, pour faire du profit, et non pour préserver le système terre et restaurer la cohésion sociale en diminuant les inégalités.

Cette domination de la « shareholder value maximisation » (SVM), c’est-à-dire la maximisation de la valeur pour l’actionnaire a donc été sous-estimée par les promoteurs sincères de l’entreprise soutenable. Deux autres causes expliquent selon l’auteur, l’échec du « sustainable business ».

Le greenwishing, un vœu pieu

La seconde raison de l’échec est selon Duncan Austin, le greenwish, qui se caractérise par la tendance à laisser une fine couche de progrès en durabilité (quelques résultats RSE positifs) distraire notre attention de la réalité : la réalité qui est le caractère insoutenable (non « durable ») de la majorité de l’économie.

Le greenwishing prolonge la tendance à vouloir cadrer le problème et les solutions autour d’un récit gagnant-gagnant optimiste (optimistic win-win), alors qu’une partie des solutions sont coûteuses et non profitables.

Il se manifeste par la tendance à survendre les impacts positifs de l’entreprise responsable et à exagérer la contribution de ses produits ou services à une durabilité.

« Il se pourrait bien que nous soyons confrontés à une nouvelle épidémie de « greenwish » -  la croyance ou l’espoir sincère que les efforts actuels pour rendre le monde plus durable vont permettre d’atteindre le changement, alors que c’est loin d’être le cas. Cette posture peut se révéler tout aussi nocive que le greenwash et peut-être même plus difficile à défaire, car elle est plus répandue et résulte principalement de bonnes intentions. »

Entre les lignes, Austin assène une critique féroce à l’encontre de l’idée que ce sont les entreprises (ou le business) qui peuvent sauver le monde. « L’économie seule ne peut pas résoudre notre problèmes écologiques », juge-t-il bon de préciser. Là aussi, affirmation naïve ? Oui, mais sans doute pas si évidente à faire passer auprès de ses collègues.

Pour un changement systémique

La troisième cause de l’échec serait de ne pas avoir compris que les problèmes environnementaux (sociaux et sociétaux aussi ?) demandent des réponses systémiques pour être résolus. Les solutions RSE isolées au niveau d’une entreprise ne suffisent pas et ne fonctionnent pas. Il faut des solutions collectives globales, et celles-ci impliquent l’action d’institutions autres que celles des « marchés » : les Etats, en particulier.

Ce constat, là aussi, semblera naïf pour qui a lu Karl Polanyi et ses analyses de l’encastrement / désencastrement de l’économie dans la société… Ainsi que pour les sociologues de l’économie et les économistes de l’environnement… Mais il est tout de même instructif et intéressant de voir un acteur pionnier et expérimenté de la finance durable anglo-saxonne, appeler à plus d’Etat et à plus d’action politique, après avoir décrit l’échec de l’ISR.

In fine, quelles sont les solutions systémiques que Duncan Austin appelle de ses vœux ? Je regrette qu’elles soient finalement assez classiques et théoriques : classique et bienvenu, son plaidoyer pour plus de taxes environnementales.
Classique, l’idée que le « signal prix » et la monétisation des dommages environnementaux font partie de la solution. Théorique, son invitation à sortir d’une vision tout marché et à réhabiliter la régulation étatique.

Dernière piste plus ou moins systémique évoquée par Duncan Austin, celle des coopérations entre entreprises pour créer des changements à l’échelle d’un secteur industriel et non à l’échelle d’une entreprise. Cette partie gagnerait à être étayée et critiquée. Dans la mesure où il note l’échec des initiatives volontaires (non légales), les coopérations pré-concurrentielles et sectorielles ne risquent-elles pas de décevoir elles aussi ?

En guide de résumé critique, l’analyse proposée me semble incisive et le concept de « greenwishing » colle bien à la réalité que j’observe. Pour autant, l’auteur est faible sur les solutions systémiques. Il ne s’attaque qu’à une partie du « dragon », délaissant la question des modes de vie (soutenables / insoutenables) et des modèles de (hyper ?) consommation / publicité … Ces questions, ainsi que celle de la croissance exponentielle, sont bel et bien au cœur du problème, comme l’ont compris les étudiant/es du mouvement «Pour un réveil écologique ».




Additif : quelques réactions à l'essai de Duncan Austin

John Fullerton sur son blog "The future of finance" :

"I am pleased to introduce an important idea from Duncan Austin who recently left a large sustainable investment firm after many years: “Greenwishing.” Duncan’s important message, coupled with John Elkington’s product recall last year on “triple bottom line,” a term he coined 25 years ago, reflect the growing consensus that sustainability in business is not working. Instead, the chorus for systemic transformation is growing. Duncan calls for policy change. I certainly agree. " 

Raj Thamotheram sur son blog "Preventable Surprises" :

"Duncan has been active in the sustainability field for 25 years, initially at an environmental NGO and then at a sustainable investment firm. This dual experience gives Duncan a unique insider perspective and he now researches and writes as an independent.

In the essay, he argues that the two-decade-old sustainable business movement has reached a major crossroads. On one hand, the sector seems to be thriving: a quarter (some say 50%) of global financial assets are now managed sustainably, and chief sustainability officers are common. Yet, in the real world, global environmental metrics continue to deteriorate.(...)

How does Duncan explain the divergence of these trends? He proposes that ‘greenwish’ – the earnest hope that voluntary sustainability efforts are much closer to achieving the necessary change than they really are – is our sector’s key challenge today. Greenwish may, he says, be as problematic as it’s more cynical cousin, greenwash because it is much more widespread and fuelled by good intentions."







lundi 3 décembre 2018

Quand Patagonia combat la baisse d'impôt

Pendant que les Gilets Jaunes en colère expriment leur "ras-le-bol fiscal", une baisse de l'impôt bien réelle est déjà en cours, en France : celle de l'impôt sur les sociétés (IS). Alors qu'il était à 33% en 2017, le taux de l'IS va atteindre 26,5% en 2021. Voilà qui donne du poids à l'affirmation suivant laquelle Emmanuel Macron a un agenda "pro business". En écho à cette baisse de la pression fiscale, qui interpelle quiconque a en tête les nouvelles fragilités sociales et environnementales (autant de défis actuels et futurs nécessitant de l'argent public), deux signaux intéressants peuvent être relevés dans l'actualité. Ils permettent de réfléchir à la responsabilité fiscale des entreprises et donc à l'avenir de la Responsabilité Sociétale (RSE). Ces signaux sont tous les deux observés aux Etats-Unis.

Annonce de Patagonia sur le réseau Likedin, 28 novembre 2018

Outre Atlantique, où les "tax cuts" voulues par Trump sont effectives, une entreprise, Patagonia, a annoncé, le 28 novembre, par la voix de sa PDG Rose Marcario, qu'elle refusait le bénéfice de la baisse d'impôt. Dont acte : Patagonia va reverser l'intégralité du produit de cette baisse, à savoir 10 millions de dollars en 2018, à des ONG environnementales.

Voici comment Rose Marcario, la PDG de Patagonia, explique son geste : "Etre une entreprise responsable signifie payer ses impôts en proportion de son succès". Elle ajoute un plaidoyer pour l'impôt, ancré sur le constat de la crise environnementale et climatique :

"L'impôt finance nos services publics essentiels et nos institutions démocratiques. Les taxes protègent les plus vulnérables dans notre société, nos terres publiques et d'autres ressources essentielles au vivant. En dépit de cela, l'administration Trump a débuté des baisses des taxes sur les entreprises, qui menacent ces services, au détriment de notre planète".


L'intégralité de son annonce est accessible ici : https://www.linkedin.com/pulse/our-urgent-gift-planet-rose-marcario

Le deuxième signal intéressant est un article de l'influant économiste américain Jeffrey Sachs. Un jour avant l'annonce de la PDG de Patagonia, il a publié sur le site Project Syndicate, un appel à instaurer "des nouvelles taxes globales".

"L"heure est venue d'imaginer des nouvelles taxes globales, sur les profits des entreprises, sur les comptes offshore, sur les transactions financières internationales, sur la richesse net des milliardaires et sur la pollution, afin de payer pour un monde sous stress et interconnecté".

Serait-ce le retour du rêve de la Taxe Tobin ? Rien de nouveau sous le soleil des utopies ? Si, une chose. Nombreux sont aujourd'hui celles et ceux qui invitent à considérer les entreprises multinationales comme des entités "politiques", de par leurs pouvoirs transfrontaliers inédits et leur puissance de lobbying. En tant qu'agents non seulement économiques, mais aussi politiques, on doit attendre d'elles qu'elles se prononcent sur, voir qu'elles bataillent pour, l'instauration de nouvelles taxes globales. Une question brûlante de responsabilité. 




Détail de la baisse de l'impôt en France. Source : Service-public.fr, 3 décembre 2018


Sources :

https://www.linkedin.com/pulse/our-urgent-gift-planet-rose-marcario

https://www.project-syndicate.org/commentary/financing-global-and-regional-public-goods-by-jeffrey-d-sachs-2018-11

vendredi 28 avril 2017

Repair Café, innovation sociale européenne

Depuis 1981, la Fonda agit comme "laboratoire d'idées" pour le monde associatif.

Le numéro 233 de sa revue trimestrielle est consacré à l'innovation sociale.

Cela m'a motivé pour proposer un article sur les Repair Café, que j'ai contribué à implanter en France, depuis début 2013.

Cet article récit est titré : Repair Café, innovation sociale européenne

Je vous invite à le découvrir dans la Tribune Fonda n°233

[Extrait] Depuis leur création à Amsterdam en octobre 2009, les ateliers de réparation « Repair Café » ont connu un fort développement en Europe. Ils étaient plus de 1000 en décembre 2016, dont 120 en France. Dans l’hexagone, leur diffusion s’est faite de manière décentralisé. Deux modèles majoritaires ont émergé : Repair Café en tant qu’activité additionnelle pour une association existante et Repair Café comme nouveau projet associatif à part entière. Récit de cet essaimage singulier.




ADN d’une innovation sociale

Repair Café répond à un besoin sociétal qui était insatisfait : la réparation d’objets du quotidien, en particulier ceux à faible valeur marchande. Petit électroménager, couture, équipement audio vidéo, objets insolites et informatique…Beaucoup seraient jetés ou bien stockés dans les armoires, sans l’action des bricoleurs bénévoles. En plus de l’utilité environnementale, Repair Café embarque plusieurs niveaux d’utilité sociale : des savoir-faire négligés, ceux du bricolage, sont mis en valeur et se renforcent au fil de la co-réparation. L’intergénérationnel et la mixité sociale sont favorisés.

lundi 13 juin 2016

Solaire au Chili : tombés dans le panneau

L'information a été largement relayée sur les réseaux sociaux et divers sites d'information : Au Chili, il y aurait tellement de panneaux solaires installés que l'électricité y serait devenue gratuite une partie de l'année. Hélas, l'information est fausse, sauf pour quelques villages (et encore ?). Au total, seule 5% de la capacité électrique installée et raccordée aux réseaux électriques du pays est solaire (chiffres du gouvernement, mai 2016).


Il y a quelques jours, je suis tombé par hasard sur un titre choc : Chili : l'énergie solaire est si abondante qu'elle est gratuite ! Information publiée par le nouveau media Positivr. Cela m'a fortement intrigué car je m'étais intéressé aux énergies renouvelables pour un article écrit pour Novethic, en 2013 ("Hidroaysen, casse-tête énergétique au Chili"). Et j'en gardais l'idée que le Chili est à la traîne en matière d'énergie solaire, malgré un potentiel fort, qui n'a pas échappé à tous les voyageurs passés dans le désert de l'Atacama. Trois ans plus tard, cela aurait donc changé du tout au tout ? Pas tout à fait, en réalité : d'après les statistiques du gouvernement, sur une capacité raccordée de 21056 MW, seul un petit 1112,8 MW est solaire. Soit 5%. Certes, le nouveau gouvernement de Michelle Bachelet met bien les bouchées doubles sur les énergies renouvelables, mais c'est le cas seulement depuis 2014/2015 et aujourd'hui plus de 70% de l'électricité du pays est produite avec du pétrole, du gaz et du charbon. Et elle est payante pour 99% des Chiliens.

Bloomberg, un article au titre trompeur
Comment expliquer la diffusion de cette fausse information ? Tout est parti d'un article de Bloomberg au titre trompeur et d'un graphique mal interprété. La suite est assez symptomatique de la tendance croissante, dans les médias, à relayer une information sans la vérifier à la source. Avec l'accélération de l'infobésité et le manque de moyens dont souffrent les rédactions, vérifier sa source n'est plus systématique. 

Dans le cas qui nous intéresse, tout est parti d'un article de Bloomberg, intitulé :  « Chile has so much solar energy it's giving it away for free ». Traduction : "Le Chili a tellement d'énergie solaire qu'il le donne gratuitement". L'affirmation se base sur l'interview du patron d'un producteur l'électricité (Acciona), Rafael Mateo, qui explique qu'il y a actuellement une ruée vers l'or solaire au Chili et que les dernières centrales solaires qui ont été mises en opération seraient en surcapacité locale. 

Surcapacité, mais hyperlocale
Et les prix gratuits, dans tout ça ? L'interviewé ne dit rien à ce sujet mais le journaliste affirme que « les prix spot ont atteint zéro dans plusieurs endroits du pays, pendant 113 jours jusqu'en avril ». Pour illustrer, il publie le graphique des prix spot où l'on voit le prix effectivement descendre à zéro. Mais où ça ? Et quels prix ? Le graphique indique qu'il s'agit de la sous-station Diego de Almagro, sans préciser quelle est sa puissance raccordée et où elle se situe.



La suite du paper explique que ce prix "spot" bas est en fait lié au non raccordement des centrales solaires du Nord du Chili aux réseaux du centre et du sud. Il s'agit donc d'une sorte de surcapacité hyperlocale, dans un pays où les lignes à haute tension du Nord ne sont pas connectées à celles du Sud.

Quels sont ces "plusieurs endroits" où l'électricité "spot" est gratuite ? Dans quelle mesure un prix spot égal à zéro se traduit-il par un prix zéro pour les clients finaux ? Et quelle est la puissance en MW concernée ? J'ai cherché l'information dans la presse chilienne (via le web) et je n'ai pas trouvé la réponse. (juste un article de 2014 mentionne un village autosuffisant en électricité, grâce à des panneaux solaires)... Par contre, les statistiques du gouvernement (la CNE) sont formels ; ils indiquent que la sous-station de Diego de Almagro est raccordée à une centrale solaire d'une capacité de...28 MW. A titre de comparaison, la plus grosse centrale solaire en France affiche une puissance de 300 MW.

En résumé, le solaire au Chili pèse peu, 5% de la capacité d'électricité du pays et le boom récent du solaire n'a pas entraîné la gratuité des prix pour grand monde. Voir, pour personne ? (voir ma note en fin d'article).


Article dans l'Express Live (rien à voir avec le magazine l'Express) :



Dimanche 11 juin sur France Inter, quelle ne fut pas ma surprise, d'entendre François Siegel, le directeur du magazine We Demain, reprendre lui aussi l'exemple du Chili, pays tellement avancé dans l'énergie solaire que l'électricité y est gratuite ! Dans l'émission La Politique autrement de Stéphane Paoli.



Quelle leçon tirer de cette histoire ? Vérifier les sources, plus que jamais. Et ne pas prendre Positivr et l'Express Live pour des médias fiables.

Pour ceux que cela intéresse, voici les chiffres des capacités de production électrique au Chili raccordées aux réseaux d'électricité, d'après la commission chilienne de l''énergie (Total et pour les deux principaux réseaux du pays SING et SIC). 


AJOUT DU 14 JUIN.
J'ai contacté Acciona, le producteur d'électricité renouvelable qui est interviewé par Bloomberg, pour savoir s'ils offrent de l'électricité gratuitement : la réponse est non. Est-ce qu'un prix "spot" égal à zéro (comme cela a été le cas à la sous-station d'Almagro) implique un prix zéro pour le client ? Pas forcément, car il y a des taxes et des frais de péage qui s'ajoutent, d'après Acciona.

Extrait de mon échange avec Acciona:

Hola Thibault,

Gracias por ponerte en contacto con ACCIONA.

El artículo de Bloomberg ha dado margen a cierta confusión, al no distinguir los operadores de energías renovables que operan con contratos de suministro de largo plazo (Power Purchase Agreements, en inglés), que es nuestro caso, y los que desarrollan proyectos de energía para venderla en el mercado spot.

ACCIONA desarrolla proyectos únicamente con contratos de suministro de largo plazo, como es el caso de la planta fotovoltaica de El Romero, actualmente en construcción, que suministrará los centros de datos de Google en el país.
(...)
Nosotros no hemos sido afectados por los bajos precios del poolni hemos vendido energía a coste cero, porque no vendemos energía al mercado pool.       
(...)
El precio spot es solo una parte del precio que paga el consumidor. Luego hay impuestos, peajes que también repercuten en la tarifa. Tendrías que consultar a un analista chileno para  conocer estos detalles".




mercredi 8 juin 2016

Enquête Globescan 2016 Sustainability leaders

Le 7 juin, Globescan et Sustainability ont publié les résultats de leur enquête mondiale "2016 Sustainability leaders" ("les leaders du durable") qui s'intéresse aux entreprises, gouvernements et ONG. Du côté des entreprises performantes en RSE, on retrouve Unilever et Patagonia. Les ONG sont vues comme ayant le plus d'impact, avec les entreprises sociales, pour faire avancer l'agenda du développement durable. Bien qu'il soit discutable (Oh my God la France y est absente !), ce classement fournit quelques indications précieuses.

"Fier d'être troisième, félicitations à Unilever et Patagonia", tweetait le fabricant de moquettes Interface, hier à l'occasion de la parution du baromètre Globescan et Sustainability. Cette année, les deux sociétés de consulting se sont unies pour interroger 907 experts en développement durable (DD). Il s'agit d'experts "confirmés qui ont été interrogés par internet en avril 2016. Voici leur profil :






Tous les classements sont questionnables

Comme tous les classements RSE (et ils sont nombreux, voir à ce sujet mon article pour Youphil sur les classements qui comptent), celui-ci peut être relativisé, et même critiqué sur sa transparence et sur sa méthodologie. Par exemple, on ne sait pas si les experts sondés sont les mêmes d'une année sur l'autre ... Et dans quelle mesure sont-ils indépendants ? Ce n'est pas précisé. Le fait que Globescan, une entreprise qui fait du conseil en stratégie de (bonne) réputation, ait dans ses références clients plusieurs des marques qui ont été distinguées, comme Unilever et Ikea, n'est-il  pas un souci en terme de crédibilité ? Une enquête approfondie serait utile. Toujours est-il que le sondage sur les Sustainabilty leaders n'est pas inintéressant.

Et de fait le classement est cohérent avec d'autres évaluations, comme "Behind the Brands" d'Oxfam qui a aussi distingué Unilever depuis 2013, sur un terrain spécifique il est vrai, celui de l'agriculture durable. Patagonia ? C'est incontestablement une marque pionnière du prêt-à-porter durable, citée régulièrement par les acteurs de la RSE comme une entreprise "du haut du panier".  

Qu'en est-il du "ranking" des ONG ? Rien de très surprenant sur ce registre. Cela sera l'occasion pour certains de s'intéresser aux ONG bien connues des acteurs de l'Investissement Socialement Responsable (ISR), comme CERES. D'autres s'étonneront de l'absence de Friends of the Earth (Les Amis de la Terre).



Du côté des gouvernements, le jugement est sans appel : les Etats d'Europe et l'Europe du Nord, dont la Suède, mènent la danse en matière de crédibilité sur les politiques développement durable. Voilà qui apprendra à certains Etats géométriques (voir, hexagonaux) qu'être fier-à-bras sur le bas carbone ne suffit pas et que le DD est une affaire d'acharnement holistique et... de conviction dans la durée ?

Pour le classement des Etats je renvoie à l'étude pour les détails. Il y a plus intéressant, à mon avis.

L'enquête s'est aussi penchée sur les raisons qui expliquent le leadership RSE. Ses fondements, en quelque sorte :

Question posée par les enquêteurs :


Choisissez et classez 3 raisons qui expliquent pourquoi une entreprise peut être considérée comme leader en développement durable.

Réponses majoritaires  : 
UN une stratégie RSE qui est alignée sur la culture interne et les valeurs.

DEUX une mission RSE ("purpose") intégrée dans le coeur d'activité et dans la promesse de la marque

TROIS : rechercher des modèles économiques de rupture, qui apportent un bénéfice net positif (= une performance globale positive).

Ces trois éléments sont sans doute le mantra pour une stratégie RSE ambitieuse et différenciante. 



Et il y a dernier enseignement que je trouve très intéressant : les mouvements citoyens de changement social ("Citizen-led mass social change movements") sont considérés comme un acteur essentiel du changement vers une société plus durable.

Voici qui devrait encourager 350.org, Alternatiba et tous les mouvements décentralisés qui occupent / ont occupé / occuperont les places, d'Ankara à Madrid en passant par Paris, Montréal et Hong Kong.

Question posée par les enquêteurs :

Comment notez-vous la performance des types d'organisations suivants en terme de contribution au progrès on développement durable depuis le sommet de la Terre à Rio en 1992?

Réponses : 





Source : 

The 2016 SustainAbility Leaders

A GlobeScan / SustainAbility Survey - publié le 7 juin 2016








lundi 16 mai 2016

Travail détaché et RSE : responsabilité solidaire

Le recours au travail détaché, notamment pour (ou par) des entreprises du BTP ou des transports, est un domaine d'impact à suivre pour les praticiens de la RSE. En janvier 2015, un groupe de travail de la plateforme nationale sur la RSE a permis de faire le point sur le cadre légal. Deux notions percolent avec la RSE :  celle de "concurrence sociale déloyale" et celle de "responsabilité solidaire".




Suite au reportage de Cash Investigation sur le recours abusif au travail détaché, j'ai souhaité approfondir les relations entre travail détaché et RSE (voir mon post de blog du 20 avril 2016 "Travail détaché : nouvel enjeu de RSE ? ).

J'ai découvert qu'en janvier 2015, la question du travail détaché a fait l'objet d'une présentation à la plateforme nationale sur la RSE. Plus précisément, au groupe de travail n° 3 de la Plateforme RSE, "Implications de la responsabilité des entreprises sur leur chaîne de valeur (filiales et fournisseurs)".

A cette occasion, Anne Thauvin, chef du pôle travail illégal au sein de la DG Travail (Ministère du Travail etc) a présenté "la responsabilité solidaire sur le recours abusif aux travailleurs détachés". La responsabilité solidaire a été instaurée par la Loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale

Le compte-rendu de cette réunion, qui est très éclairant, est disponible sur le site de France Stratégie, à cette adresse :


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En résumant, la loi contre la concurrence sociale déloyale introduit des dispositions qu'on peut légitimement considérer comme une partie du "socle légal" pour toute approche RSE du travail détaché.
  • Elle crée une responsabilité solidaire pour les maîtres d'ouvrage et donneurs d'ordre en cas de non-paiement des salaires,
  • Elle impose au donneur d'ordre ou maître d'ouvrage un certain nombre d'obligations de moyens et de vérifications auprès de ses sous-traitants.
Un minimum légal que toutes les entreprises ne respectent pas, si l'on en juge par le reportage de Cash Investigation...

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Voici le compte-rendu de la présentation d'Anne Thauvin, tel qu'il a été écrit et publié par France Stratégie pour le compte de la plateforme nationale RSE :

(j'ai surligné en jaune des passages qui me paraissent intéressants ou importants)

La loi du 10 juillet 2014 s’appuie sur la proposition de loi déposée par le député Savary en Décembre 2013. Discutée avec le Ministère du travail, elle propose une sur-transposition de la directive d’exécution en matière de détachement des travailleurs publiée en mai 2014. Elle vise ainsi à lutter contre la concurrence sociale déloyale, alors que les fraudes autour des travailleurs détachés étaient en augmentation : non-respect du paiement du salaire minimal, des durées maximales de travail ou encore conditions d’hébergement déplorables. Elle confronte alors deux droits : le droit social du détachement et le droit du travail.

Cette loi va plus loin que la directive d’exécution sur le détachement en bâtissant une responsabilité solidaire en cas de non-paiement des salaires qui s’applique à tous les secteurs professionnels, et non au seul secteur du bâtiment. De plus, le régime de responsabilité est étendu à l’ensemble des maîtres d’ouvrage et des donneurs d’ordres, quel que soit leur rang dans la chaîne de sous-traitance : la responsabilité n’est donc pas limitée au cocontractant direct. Ainsi, il est possible de poursuivre le donneur d’ordre pour des fraudes relevant d'un de ses sous-traitants. Cette disposition s’applique à l’ensemble des salariés, qu'ils soient ou non détachés.

Il s’agit d’une obligation de moyen et non de résultat : s’il est prévenu par l’inspection du travail que les salariés détachés d’un sous-traitant ne bénéficient pas des dispositions légales ou conventionnelles en matière de salaire minimum, le donneur d'ordre ou le maître d'ouvrage devra lui demander de régulariser la situation. La responsabilité du DO ou du MO n’est ainsi engagée qu’à la demande d’un agent de contrôle et s’il ne remplit pas son obligation d’injonction ; il n’y a pas de mécanisme automatique.

La loi vient aussi compléter l’arsenal législatif français en matière de lutte contre les fraudes au détachement, en instaurant d’autres régimes de responsabilité solidaire :

  • L'employeur, qui détache un ou plusieurs salariés, doit adresser, préalablement au détachement, une déclaration à l'inspection du travail du lieu où débute la prestation et lui désigner un représentant pour l'entreprise. Cette déclaration est également annexée au registre unique de l'entreprise d'accueil des salariés détachés.
Le donneur d'ordre doit vérifier auprès de son prestataire de services qui détache des salariés qu'il a bien rempli ses obligations de déclaration. La "méconnaissance" par l'employeur de ses obligations en matière de détachement est passible d'une amende de 2000 € par salarié dans la limite de 10 000€. La loi Macron prévoit un déplafonnement.

  • Lorsqu’un sous-traitant héberge collectivement ses salariés (détachés ou non) dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine, le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre est tenu, à la demande d’un agent de contrôle, de prendre en charge un nouvel hébergement, à moins que l’employeur n’ait régularisé par lui-même la situation.
  • Lorsqu’un sous-traitant ne respecte pas les dispositions essentielles (matières du « noyau dur » du droit du travail énoncées par la directive détachement de 1996) énumérées à l’article L.1262-4 du code du travail (salaire minimal, durée du travail, règles relatives à la santé et à la sécurité, etc.), le maître d’ouvrage ou le donneur d’ordre doit, en cas d’alerte par un agent de contrôle, faire cesser la situation. Le non-respect de cette obligation de diligence est puni d’une sanction pénale contraventionnelle.
La loi du 10 juillet 2014 a également institué une peine complémentaire prononcée par un juge pénal en cas de condamnation pour travail illégal de diffusion de cette condamnation sur un site internet.

Enfin, la France espère que l’ensemble des autres pays européens iront sur cette de voie de la responsabilité solidaire. Un membre souligne alors qu’il faudrait évaluer l’impact de ces mesures sur la compétitivité du tissu français par rapport à ses voisins.

D’autres soulignent l’importance de l’inspection du travail dans le processus, et s’inquiètent d’un manque de moyen humain. Anne Thauvin mentionne la réforme en cours de l’inspection du travail, avec notamment la mise en place de cellules régionales du travail illégal qui vont permettre de lutter plus efficacement car collectivement contre le travail illégal et les fraudes au détachement."

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Crédit photo : Flickr fdecomite